Pour notre plus grand plaisir, la littérature érotique fait de plus en plus d’effet. Celle-ci s’est taillé une place de choix, autant dans notre bibliothèque, qu’au cœur de nos multiples appareils mobiles. Ce genre de lecture fait-il partie de votre quotidien?
Voici un délicieux texte déniché sur Jesuisvenu.com, un site web de nouvelles érotiques mises en image par de talentueux illustrateurs. Et si l’on mettait les chances de notre côté pour doper notre imaginaire érotique?
Prêtes à faire grimper la température? Prêtes à découvrir un monde plein de sensualité? À lire en solo ou accompagnée, tenez-vous le pour dit; certains passages pourraient vos donner chaud dans le ventre. Très chaud.
Nue dans le lit, j’observe le premier rayon du matin qui se profile sur le plafond. L’horloge de chevet fait tic-tac pourtant c’est un modèle numérique acheté l’année dernière au Tigre Géant. L’horloge de chevet ne fait jamais tic-tac habituellement.
Tu dors profondément. Ta respiration, régulière, tu inspires, tu expires un contretemps pour le tictac du cadran, puis tu émets un charmant triolet nasal.
Tes yeux qui s’ouvrent d’un coup comme des portes automatiques. Tes pupilles comme des petites bouées d’alignement qui flottent au large.
Tu me poses une question comme on improvise une ébauche de refrain. Faire semblant de dormir pour camoufler ma surprise. Toi tu ne démords pas, tu babilles, émergeant de tes limbes matinales dans une douce mélopée d’amour.
Ré mineur. Tes pieds qui pressent mes mollets à contretemps du tictac du cadran. Le réveille-matin qui démarre en trombe, grandiose pour un bidule.
Tu glisses ton nez dans mes cheveux et tu secoues ta tête aussi rapidement que la séquence de double-croches qui s’égrènent à la radio. Ça me chatouille la nuque et j’ai un petit frisson. Tes mains en coupe sous mes seins comme deux petites croches.
Une rafale de baisers s’abat sur mon échine dorsale pour faire écho à la grande descente de trois octaves du piano. À travers les hauts parleurs criards de ma radio à dix dollars, la mélodie semble se déformer, elle prend une allure folle et ressemble maintenant davantage à du free jazz qu’à un aria baroque. Toi tu me parles en laissant courir tes mains sur mon corps, et chacun de tes mots est une note, et chacun de tes gestes est un battement de rythme, une ponctuation musicale, une variation supplémentaire sur la trame du fond.
Tu me pénètres à grands coups de cor anglais. Ton bassin claque contre mes fesses alors que les cymbales retentissent. La forme est devenue symphonique, c’est vachement plus désorganisé que du free, comme si le maître d’orchestre était victime d’un épisode de possession satanique.
Tes mains dans mon visage sur mes yeux pétrissent mon ventre mes fesses mes cuisses. Tu palpes tout, tu possèdes. Le frottement de tes mains dans mes cheveux suscite un terrible épisode de percussions africaines alors que toi tu continues de scander en fa mineur en do majeur, entraînant le chef d’orchestre qui s’échine à l’intérieur des hauts parleurs grésillants dans une course folle.
Je me laisse porter dans ton incroyable mise en scène, tu me prends et tu décides de tout. Attaches-moi. Tes mains sont des papillons symphoniques. Tu me cherches tu me cherches dans chaque repli de peau tu me trouves tu me trouves de plus en plus liquide alors que tu te retiens, ton sexe flottant dans le mien comme un engin sous-marin.
Ton genou qui subitement vire fou. Taratatatam contre mes molets dans le matelas entre mes pieds pour te frayer un chemin vers le plancher. Mais revient dans le lit ! Tu m’attires contre toi et ton corps ondule comme la flamme du feu sur un brasier hérétique.
Tu te redresses en un seul mouvement et ta peau contre la mienne résiste freinée dans son glissement par la sueur. Tes pieds maintenant qui crépitent qui crépitent tacaracatac contre le sol dans cette mélodie plus grande que nous. Tu me mords l’épaule tellement fort que j’ai peur de saigner. Ton corps vibre et s’anime comme un vibromasseur à l’échelle humaine.
Grand claquettiste au cœur de cette tornade symphonique, tu m’entraînes tu m’entraînes et ton corps tressaute si intensément contre le mien que je peux sentir le duvet de mon dos se hérisser tout entier de frissons.
Quand je ferme les yeux nous sommes Ginger et Fred Astaire, le plancher cristallin sous nos pieds la musique qui sature l’air déjà chargé de nos respirations, c’est à couper au couteau. L’humidité de notre haleine est notre seul vêtement alors que nous vibrons comme des fous sur le linoleum de danse de la chambre à coucher. Nous suons à grosses gouttes et nous sommes déments. Nous ne discernons plus le bruissement de la radio qui n’émet plus aucunes ondes. Nous ne sommes que des notes, que des notes, et il n’y a plus de portée.