L’avènement de la populaire trilogie Cinquante nuances de Grey et dernièrement de la sortir du film a fait des vagues dans le domaine de la littérature érotique. Un roman plus accessible qui met le sadomasochisme sur la sellette, et surtout, le fantasme de la domination à la lumière du jour. Qui sont ces femmes qui rêvent secrètement d’être traitées de la sorte? Sommes-nous toutes enclines à être l’une d’elles? Réflexions sur le sujet.
Un point de vue psychologique
Selon la sexologue Émilie Couturier, B.A., les fantasmes et la lecture érotique ont un point en commun, soit l’imaginaire. «Lire sur le sujet attise notre curiosité sans nous impliquer à essayer», dit-elle. Qu’est-ce que c’est, ce que ça fait… et surtout, pourquoi on aimerait ça? Dans le roman en question, on apprend à découvrir la pratique au même rythme que la narratrice. Et oui, le fait que le récit soit, disons, soft change notre perception du sadomasochisme. Selon le Global Sex Survey, 10% de la population nord-américaine aurait essayé le «SM», comparativement à 3% de la population française. Surprises? On l’est. L’auteure Erika Leonard – britannique, va sans dire – semble avoir cherché à faire taire les tabous, et à émoustiller les lectrices face à des désirs imaginaires nouveaux. Malgré tout, elle a été prudente en matière de scènes pouvant choquer, rejoignant ainsi la population moyenne, ou encore les adeptes de la mommy porn.
Le livre en soi, on dit qu’il représente un conte pour enfants dans un corps d’adultes; pensons entre autres au Petit Chaperon rouge ou à Barbe Bleue. C’est une histoire d’amour teintée de la volonté de vouloir répondre aux besoins de celui qu’on aime, ou mieux, du rêve de pouvoir changer quelqu’un. L’essence même du récit nous paraît pourtant assez stéréotypée: un homme riche qui a tout pour lui et n’a d’yeux que pour une jeune fille un peu banale, lui offrant luxe, sensualité et surtout, attention. Ce genre d’épisode, on l’a vu à maintes reprises. Ce qui différencie le fameux Christian Grey de tous les autres? Sa perversion pour les cravaches, les pinces et les claques!
La pratique SM
De plus en plus, on parle plutôt de BDSM (bondage, discipline, domination, soumission, sadomasochisme), qui représente des pratiques sexuelles impliquant la douleur. Il faut savoir que c’est avant tout un jeu de rôles, bref, un «jeu». Le dominé choisit de l’être, et a tout le contrôle sur son niveau de douleur, car il peut arrêter à tout moment. Mais qui donc aurait envie de vivre ce genre d’expérience? «Une personne qui a beaucoup de pouvoir dans la vie et qui recherche un exutoire au lit, ou bien quelqu’un qui associe un niveau passionnel à une torture quelconque. Le niveau de douleur est différent pour chaque personne et peut être en lien avec une relation vécue ou un traumatisme du passé», nous explique Émilie. D’accord, mais il y a plus. Le sentiment de plaire, de lâcher prise et d’être contrôlée. Tenez-vous le pour dit: ce ne sont pas que des femmes qui ont ce désir…
Attention, la tendance n’est pas à prendre à la légère: «La société est malheureusement très influençable. On a apparemment noté une augmentation d’achat de fouets suite à la sortie du livre. Tout ça est quelque peu inquiétant, car les gens risquent d’essayer de reproduire une scène du livre sans l’adapter à eux-mêmes», nous dit la sexologue clinicienne Séléna Bergeron. Le risque? D’être déçue, choquée, ou pire, de se forcer à aimer la pratique. «Si par contre ça peut éveiller des fantasmes et que le tout demeure sain, c’est bénéfique», selon cette dernière.
La lecture érotique: in?
Ce livre, on le voit partout, souvent lu en public. Est-ce malaisant? «C’est le premier roman du genre, qui ajoute un aspect émotif à l’érotisme de l’histoire, et c’est ce que les femmes aiment. Il ne faut simplement pas dévier vers la banalisation de l’intimité, et exposer celle-ci sur la place publique», nous dit Séléna. Et si cela suscitait un boom pour les sections XXX des librairies? Petit conseil: la sexualité, c’est une affaire personnelle. Lire le livre à la lumière du jour, en pleine heure de pointe dans le métro… pensez-y deux fois!